Adressé à l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) : principales évolutions du phénomène des drogues et des toxicomanies en France
Rapport national à l'OEDT - 2003
Les rapports nationaux sont des documents dont la version finale est rédigée en anglais.
Les versions françaises mis à disposition sur le site sont des documents intermédiaires, intégrant déja pour la plupart une couverture et des titres en anglais, prédéterminés par l'OEDT.
Contexte politique 2002-2003 et derniers développements
L’année 2002 a été marquée, en France, par un changement de gouvernement et de majorité politique. Le nouveau discours politique, plus offensif en matière de répression s’est traduit par un regain d’activité des forces de l’ordre (mise en place des groupes d’intervention régionaux (GIR) chargés notamment de la lutte contre le trafic local de stupéfiants) et s’est accompagné de nouvelles dispositions législatives (création d’un délit de conduite sous l’influence de substances classées comme stupéfiants par exemple).
Au début de l’été 2003, a été initié un processus de réforme de la loi de 1970 – loi qui fixe les principaux objectifs de l’action publique en matière de lutte contre les drogues -. Le principe de ce changement avait été sous-entendu depuis le début de l’année 2003 par les déclarations successives de plusieurs ministres et repris dans les conclusions du rapport d’une commission du Sénat (Olin et Plasait, 2003). Les différents scénarios de réforme, réalisés par la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) en concertation avec l’ensemble des ministères ont été transmis au Premier ministre. Ce dernier devrait alors se prononcer sur l’option retenue d’ici la fin de l’année en cours.
Depuis juin 2002, fin du plan triennal 1999-2002 prorogé, les orientations du gouvernement en matière de stratégie de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances n’ont pas encore été officiellement formalisées dans le cadre d’un plan. Les intervenants de terrain continuent leurs activités sur les principes du plan triennal 1999-2002 tout en faisant face à des restrictions budgétaires plus ou moins importantes.
2002 - Chiffres clés -
22,8 % des 18-75 ans ont expérimenté le cannabis au cours de leur vie ; 2,0 % ont expérimenté la cocaïne ; 1,4 % ont expérimenté les amphétamines ; 0,8 % ont expérimenté l’ecstasy ; 0,7 % ont expérimenté l’héroïne.
90 000 est le nombre estimé de personnes par mois sous traitement de substitution au cours de l’année 2002
Selon les sources, 30 à 60 % des consommateurs d’héroïne et 30 % à 55 % des consommateurs de cocaïne pratiquent l’injection
97 décès par surdoses ont été recensés en 2002, niveau le plus bas jamais atteint
240 nouveaux cas de sida et 199 décès chez les usagers de drogues par voie injectable.
96 740 interpellations pour infraction à la législation dont 84 % concernent des faits d’usage
65 907 saisies ont été opérées en France, le produit le plus couramment saisi étant le cannabis
Le prix médian du gramme d’héroïne blanche est de 80 €, 53 € pour l’héroïne brune. Le comprimé d’ecstasy est vendu en moyenne à 11,3 €. Le prix moyen du gramme de cocaïne varie de 52 à 91 € selon les sites.
Consommations
En population générale, les évolutions observées confirment d’année en année la place du cannabis comme drogue illicite la plus fréquemment consommée. Les prévalences d’expérimentation (avoir consommé au moins une fois dans sa vie) et d’usage au cours des 12 derniers mois chez les adultes sont en effet en hausse : 22,8 % chez les 18-75 en 2002 contre 19,6 en 1999 pour l’expérimentation et 7,5 % en 2002 contre 6,0 % en 1999 pour l’usage au moins une fois au cours des 12 derniers mois (Beck et Legleye, 2003b).
Le niveau d’expérimentation des autres drogues reste stable (sauf dans le cas de la cocaïne) et marginal. Les derniers calculs réalisés estiment le nombre d’expérimentateurs d’héroïne parmi la population française de 18-75 ans à 300 000, contre 850 000 pour la cocaïne, 350 000 pour l’ecstasy (Beck et Legleye, 2003b).
Parmi les jeunes âgés de 17 ans, les enquêtes auprès des jeunes scolarisés soulignent le doublement du niveau d’expérimentation du cannabis entre 1993 et 2002 ainsi que le triplement du niveau de son usage répété (consommation au moins 10 fois au cours de l’année) sur la même période (Beck et Legleye, 2003a). Les niveaux d’expérimentations des autres drogues illicites restent inférieurs à ceux de l’alcool, du tabac ou du cannabis mais ont cru entre 2000 et 2002. C’est notamment le cas des produits à inhaler (4,1 % en 2000 vs 5,2 en 2002), des champignons hallucinogènes (3,1 % en 2000 vs 4,2 en 2002), du poppers (2,4 % en 2000 vs 4,0 en 2002), de l’ecstasy (2,9 % en 2000 vs 3,9 en 2002) et des amphétamines (1,0 % en 2000 vs 2,0 en 2002).
Tendances récentes
Dans la continuité des observations réalisées en 2001 par le dispositif TREND (Tendances récentes et nouvelles drogues), il semble que l’injection, même si elle reste la pratique prédominante chez les usagers fréquentant les structures de « bas seuils » soit en baisse et notamment chez les usagers les plus jeunes, tandis que la pratique du « sniff » se diffuse de plus en plus largement.
Les comportements à risques chez ces usagers subsistent : 26 % des injecteurs ont partagé leur seringue au cours du mois écoulé (Bello et al. 2003). Parmi les sniffeurs récents, la pratique du partage reste également répandue : au cours du mois écoulé, les trois quarts des personnes déclarent avoir partagé le produit et près de la moitié (43 %) leur paille (Bello et al. 2003).
Certains mésusages de BHD, principal produit de substitution aux opiacés en France, ont été identifiés, facilités par la disponibilité du produit sur les marchés parallèles urbains. Pour ce produit, des pratiques d’injection et de sniff ont été mises en évidence parmi les usagers de structures de « bas seuil», ainsi que des usages non substitutifs (primo-usages et primodépendance).
Indicateurs sanitaires et sociaux
On a pu noter, dans la continuité des tendances observées depuis 1998, une augmentation de la présence des patients âgés de 40 ans et plus et de mineurs parmi les patients pris en charge dans les centres spécialisés de soins pour toxicomanes (CSST).
Parmi les substances à l’origine de la prise en charge des patients dans les CSST, la part de la cocaïne et du crack s’accroît sensiblement, dans la continuité des données l’année précédente et des observations réalisées par le dispositif TREND. Les opiacés restent les principaux produits à l’origine des prises en charge en France.
On pourra également noter que les substances les plus consommées au cours du mois écoulé par les personnes fréquentant les structures de « bas seuil », mis à part l’alcool, le tabac et le cannabis, sont la cocaïne, la buprénorphine haut dosage (BHD) et l’héroïne (Bello et al. 2003).
En 2002, le nombre de décès par surdose recensés par les services de police s’élève à 97. Ce niveau est le plus bas atteint depuis le début des années 1990. La part grandissante de la cocaïne et des médicaments dans les décès par surdose (14,6 % des décès renseignés en 2002 contre 9 % en 2000 pour la cocaïne ; 33 % des décès renseignés en 2002 contre 29 % en 2000 pour les médicaments) est une des tendances majeures des chiffres de 2002.
Pour compléter les statistiques officielles de la mortalité, sont exposés dans ce rapport les premiers résultats d’une enquête de cohorte sur la mortalité d’usagers interpellés. Cette enquête, effectuée à défaut d’une enquête de cohorte auprès d’usagers actifs fréquentant un centre de traitement, est la première enquête de cohorte d’envergure sur la mortalité d’usagers réalisée en France (42 000 enregistrements). L’enquête a permis de déterminer que les usagers interpellés, à sexe et âge égal, ont un taux de mortalité plus élevé que celui de la population française, mais qui reste cependant en deçà de ceux d’usagers actifs mesurés dans d’autres pays européens.
Après une baisse marquée de l’ensemble des indicateurs pénaux en 2001 (interpellations, condamnations, incarcérations), les chiffres de 2002 laissent présumer d’un retour aux niveaux atteints en 2000 et antérieurement.
L’interpellation pour usage de cannabis reste l’interpellation la plus courante (76 % de l’ensemble des interpellations réalisées en 2002 contre 71 % en 1998). Plus de 10 000 personnes ont été incarcérées en France au cours de l’année 2002 pour une infraction à la législation sur les stupéfiants (ILS), soit 13 % de l’ensemble des entrants de 2002. Au 1er janvier 2003, 15 % de la population carcérale est détenue suite à une ILS (ils étaient 12 % au 1er janvier 2002 et 21 % en 1995).
Offre
Les nouvelles dispositions législatives et l’augmentation de l’activité policière dans le courant de l’année 2002 ont eu un impact sur l’organisation des trafics dans l’espace urbain1 et dans l’espace festif techno (Bello et al. 2003).
Dans l’espace urbain ont été constatés une diminution de l’accessibilité de l’héroïne, une offre croissante de stimulants et d’hallucinogènes, un déplacement du trafic vers des lieux et espaces moins visibles.
Dans l’espace festif techno, les nouvelles réglementations encadrant l’organisation d’évènements a contribué au déplacement du trafic vers le milieu urbain et des festivals musicaux hors culture techno du fait de la taille maintenant réduite des évènements festifs.
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Télécharger le Selected issue : Evaluation des stratégies nationales en matière de drogues
Télécharger le Selected issue : Problèmes de cannabis: comprendre l’augmentation de la demande de traitement
Télécharger le Selected issue : Co-morbidités