Nouveaux produits de synthèse - Synthèse des connaissances

Focus sur les cannabinoïdes de synthèse.

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Cristaux - produits de synthèse

Présentation

Dans le langage courant, NPS est utilisé pour « nouveaux produits de synthèse ».

NPS est aussi l’acronyme de New Psychoactive Substances (nouvelles substances psychoactives). Ce terme est défini dans la Directive (EU) 2017/2103 par « un nouveau stupéfiant ou médicament psychotrope à l’état pur ou de préparation qui n’est pas contrôlé par les conventions des Nations Unies sur les drogues, mais qui peuvent constituer un risque pour la santé publique comparable à celui que représentent les substances listées dans ces conventions. »

Ces molécules peuvent être classées en différentes catégories, en se basant sur leurs propriétés pharmacologiques et/ou leurs structures chimiques.

Certaines substances qui ne sont pas forcément considérées comme nouvelles mais dont l’usage récréatif est émergent peuvent rentrer dans cette définition. Par exemple, la kétamine est un médicament anesthésiant qui est parfois détourné de son usage médical.

Parmi ces différentes familles, les substances les plus fréquemment observées en France appartiennent aux groupes des cathinones de synthèse et des cannabinoïdes de synthèse.

Les cannabinoïdes de synthèse sont des molécules synthétiques qui se lient aux mêmes récepteurs cannabinoïdes que le THC. Ces molécules ont des structures chimiques variées et pour la plupart ne sont pas structurellement apparentées aux cannabinoïdes classiques. Ils sont également désignés par le terme « agonistes synthétiques des récepteurs cannabinoïdes ». Leurs effets et leurs puissances diffèrent largement de ceux du cannabis. Ils peuvent être consommés sous la forme de poudre pulvérisée sur des morceaux de plantes faiblement psychoactives (« spice ») ou du tabac (produit appelé « chimique » à Mayotte et à La Réunion), ou sous la forme e-liquide. Selon le cannabinoïde, la durée et la puissance des effets est très variable d'une molécule à l'autre.

En Europe, 209 nouveaux cannabinoïdes de synthèse ont été détectés depuis 2008 et 24 signalés pour la première fois en 2022.

Production/offre

Saisies

Parmi les nouvelles substances psychoactives identifiées par le bilan STUPS© 2022 (Système de traitement uniformisé des produits stupéfiants) qui regroupe les données du Service national de police scientifique (SNPS) et de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), 52 fiches ont concerné des cannabinoïdes de synthèse, notamment des ADB-BUTINACA, 4-F-MDMB-BUTINACA (4-F-MDMB-BICA) et MDMB-4en-PINACA (MDMB-PENINACA).

En 2022, un total de 26 nouvelles premières identifications sur le territoire national a été rapporté par le dispositif Système d’identification national des toxiques et substances de l’OFDT (SINTES) à l’EMCDDA dans le cadre de l’Early Warning System. Comme l’année précédente, ces nouvelles molécules appartiennent majoritairement à la famille des cannabinoïdes de synthèse.

En 2019, les États membres de l’UE étaient à l’origine d’environ 6 500 des 18 700 saisies signalées dans l’Union européenne, en Norvège et en Turquie, et de 200 des 900 kilogrammes saisis.

Offre

La plupart des cannabinoïdes de synthèse sont fabriqués par des entreprises situées en Chine. Ils sont notamment vendus via Internet. Les fabricants de cannabinoïdes de synthèse remplacent les produits, au fur et à mesure de leur interdiction, par d’autres substances non encore identifiées par les autorités de contrôle.

Certains usagers expérimentés confectionnent eux-mêmes leur propre e-liquide à partir de cannabinoïdes de synthèse achetés sous la forme poudre sur Internet. À l’inverse, d’autres consommateurs se procurent ces produits déjà conditionnés, vendus sous des appellations commerciales (PTC - Pète ton Crâne, Mad Hatter, Buddha Blues, etc.), ne coûtent que quelques dizaines d'euros et sont parfois sans mention des molécules contenues. Si les cannabinoïdes de synthèse sont presque exclusivement achetés sur Internet, des reventes sur le marché physique sont sporadiquement observées, le produit étant alors rarement présenté sous son appellation réelle.

Ces fioles d’e-liquides et sachets sont également très marketés afin de les rendre plus accessibles pour les populations les plus jeunes, étant très colorés et portant des noms attrayants. Comme il n’y a pas de THC dans les cannabinoïdes de synthèse, leur utilisation n’est pas repérable par les tests classiquement utilisés pour repérer le cannabis.

Les cannabinoïdes de synthèse se retrouvent parfois dans des usages d’autres produits adultérés à l’insu du consommateur. Il a été par exemple récemment observé en France de l’herbe de cannabis, des e-liquides et de l’héroïne adultérés aux cannabinoïdes de synthèse.

Consommation en population adolescente

On mesure peu d’usage récent avéré pour les cannabinoïdes de synthèse dans la population adolescente, son usage reste encore marginal. À travers l’Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense (ESCAPAD) en 2017, comme en 2014, une question permettait de décrire les usages de NPS chez les jeunes en fin d’adolescence. Au total, 3,8 % des jeunes de 17 ans déclarent avoir déjà consommé un produit imitant les effets d’une drogue. Cependant, seuls 11,8 % d’entre eux ont précisé de quel produit il s’agissait, principalement un cannabinoïde de synthèse.

En 2023, l’enquête n’explorait pas les usages de nouveaux produits de synthèse, mais quelques rares déclarations spontanées suggèrent l’émergence d’usages de cannabinoïdes de synthèse.

consommation en population adulte

En 2017, le Baromètre santé de Santé Publique France permettait de savoir si les personnes avaient déjà consommé des cannabinoïdes de synthèse au cours de leur vie. Au total, 1,3 % des 18-64 ans déclarent en avoir déjà fumé, ce qui représente 3 % des expérimentateurs de cannabis et 12 % des usagers dans l’année. Ce pourcentage situe les cannabinoïdes de synthèse à un niveau d’usage similaire à celui de l’héroïne. Les expérimentateurs sont en majorité des hommes (1,7 % vs 0,8 % des femmes) et des moins de 35 ans : 3,5 % des 18-34 ans (4,3 % des hommes et 2,7 % des femmes) ont expérimenté le cannabis de synthèse, contre 0,2 % des 55-64 ans. Les cannabinoïdes de synthèse continuent de constituer le type de NPS le plus fréquemment consommé.

Conséquences

Les présentations commerciales des NPS posent le problème de la connaissance du consommateur sur la véritable nature des contenus. Elles entretiennent un doute sur le caractère synthétique des produits (présentation sous forme d'herbe), ou utilisent des formes qui suggèrent que les compositions et les dosages sont préalablement contrôlés.
Or, il existe une grande variabilité des dosages entre les NPS, et par conséquent des effets ressentis et/ou indésirables.

Une intoxication aiguë aux cannabinoïdes de synthèse peut se caractériser par des troubles cardio-vasculaires, digestifs, ou pulmonaires, comme de la tachycardie, des crises convulsives, des difficultés respiratoires, des hallucinations visuelles et auditives, une mydriase, de l’agitation et anxiété, des nausées et vomissements, des maux de tête. Quand la drogue est sous forme e-liquide, le consommateur n’a pas la mainmise sur le contrôle de son dosage. En cas d’erreur, cela peut être fortement préjudiciable. C’est le cas du Buddha blues, dont le cannabinoïde de synthèse est le 5F-AKB-48.

Le dispositif Système d’identification national des toxiques et substances de l’OFDT (SINTES) a mis en évidence des échantillons d’herbe adultérés aux cannabinoïdes de synthèse (pour 3 produits seulement). Trois molécules ont été retrouvées : 4F-MDMB-BICA associé au JWH-210, et l’ADB-BUTINACA. Le dispositif SINTES a observé en 2022 que parmi les échantillons collectés de liquides de vapotage adultérés aux cannabinoïdes de synthèse, l’âge de l’usager mentionné dans les questionnaires était inférieur à 18 ans dans 15 cas parmi les 23 échantillons de e-liquides aux cannabinoïdes de synthèse.

Depuis 2021, une coordination du dispositif Tendances récentes et nouvelles drogues (TREND) a été implantée sur l’île de La Réunion à la demande de l’Agence régionale de santé (ARS). Elle a permis de mettre en lumière les spécificités de ce territoire ultramarin en matière de trafic et d’usages de drogues, d’accès aux soins et plus globalement de réponses publiques apportées à ces phénomènes. Sur le plan des usages, les investigations ont mis en évidence plusieurs spécificités. La consommation de cannabinoïdes de synthèse est une caractéristique locale. Leurs conséquences socio-sanitaires (pertes de connaissance et malaises, agressivité, agitation, développement d’une addiction, etc.) ont fait l’objet de fortes préoccupations depuis la fin des années 2010. Toutefois, en 2022, des personnes ont indiqué avoir arrêté de consommer et de revendre la substance du fait d’effets trop intenses, donnant lieu à des conséquences sanitaires indésirables

Une consommation de cannabinoïdes de synthèse à long terme peut être associée à une survenue de tolérance, de dépendance, et à un syndrome de sevrage prolongé et prononcé caractérisé par une envie irrésistible, une tachycardie, une augmentation de la pression artérielle, une irritabilité, de l'agitation, des tremblements, des suées importantes, de la diarrhée, de l’insomnie…

Cadre légal et orientations publiques récentes

En France, 12 familles et 10 substances de cannabinoïdes de synthèse sont classées parmi les stupéfiants par arrêté du 31 mars 2017.

L’usage est interdit : l’article L3421-1 du Code de la Santé Publique prévoit des amendes (jusqu’à 3 750€) et des peines de prison (jusqu’à 1 an).

L’incitation à l’usage et au trafic et la présentation du produit sous un jour favorable sont interdites : l’article L3421-4 du Code de la Santé Publique prévoit des amendes (jusqu’à 75 000€) et des peines de prison (jusqu’à 5 ans).

Les actes de trafic sont interdits : les articles 222-34 à 222-43 du Code Pénal prévoient des amendes (jusqu’à 7 500 000 €) s’accompagnant de peines de prison (jusqu’à 30 ans de réclusion criminelle).